Temps de Carter, Nicaragua et Cardinal Lefebre, nazi

Lors d’une rencontre peu connue entre Carlos Andrés Pérez et Somoza, le ministre vénézuélien de la Défense, Fernando Paredes Bello, un ami de jeunesse de Tachito pour avoir été son père, Paredes Urdaneta, l’ambassadeur du Venezuela au Nicaragua pendant la présidence, a servi d’intermédiaire de Carlos Delgado Chalbaud. Paredes Urdaneta a obtenu de Tacho Somoza, une décoration pour « Fernandino » alors qu’il n’avait que 15 ans et c’est ainsi que l’amitié est née. Lors de la réunion, Tachito Somoza aurait accepté de se retirer prochainement du pouvoir, afin d’éviter qu’une poursuite de la lutte ne permette aux secteurs les plus radicaux et de gauche du sandinisme de développer un rôle dirigeant qui les placerait à des postes de pouvoir maximum dans un nouveau gouvernement qui viendrait nécessairement au Nicaragua. Le 5 juillet 1979, le Poste de Washington apporte une déclaration de Somoza: «Je me sens comme un âne fatigué combattant un tigre. Même si je gagne militairement, je n’ai pas d’avenir. »

Cela a contribué au fait que Carter a exécuté un plan étrange. Woodrow Wilson semble être son modèle de moralisme, en adhérant aux idées fabiennes de la Commission trilatérale. Mais au Nicaragua, il y a des bizarreries, Wilson l’a liée au traité Bryan-Chamorro et Carter la laisse partir. La même contradiction est vécue en ce qui concerne le Panama. Est-ce la contradiction ou la dialectique interne d’un grand plan maçonnique de cycles longs, qui demande d’investir en Amérique centrale et dans le monde dans un second tour ce qui a été fait dans le premier ?

En cela, l’Internationale socialiste est le protagoniste et partenaire de Carter, dont Willy Brandt est le grand cacao, c’est-à-dire l’Allemagne, et l’on sait déjà que l’Allemagne de la Ruhr et l’Amérique centrale forment une combinaison explosive depuis les prologues de la Première Guerre mondiale lorsque l’Union Ethelburga a reçu la concession de creuser le canal, un projet frustré mais éternellement en sommeil, y compris ce 2022. L’Internationale socialiste n’est pas seulement l’Allemagne, c’est l’Europe. A nu, l’Europe semblait, dans les années Carter, vouloir mettre la main sur un canal, s’égaler aux Etats-Unis. Le projet qui a échoué dans la Première Guerre mondiale et dans la Seconde, réapparaît varié, habillé de socialisme.

L’Allemagne socialiste est réelle, Willy Brandt est une puissante réalité politique, électorale et internationale, mais ce n’est pas la seule Allemagne. La Ruhr a une autre voix, peut-être plus authentique, en tout cas plus ancienne, celle des chevaliers teutoniques. Les chevaliers teutoniques se promènent dans des voitures Mercedes Benz, dirigent des industries ultramodernes mais vivent dans des châteaux. Ils sont présidés par la famille Thurm und Taxis, habitante d’un château situé à Ratisbonne en Allemagne. Dans le prochain gouvernement, celui de Jaime Lusinchi, la presse vénézuélienne en fera état :

« Ces oligarques européens contrôlent le réseau féodal des cultes (sectes) et des groupes paramilitaires, qui comprend les partisans de l’évêque schismatique Lefebvre…/…sont sous le contrôle de la famille Strasser. Gregor Straser était à la tête des « Hitler SA »…/…Ils travaillent pour le schisme conservateur que le cardinal français Lefebvre tente de réaliser ».

À leur manière, les chevaliers teutoniques représentaient un segment très épais du tronc du christianisme, qui remonte au haut Moyen Âge, lorsque l’aristocratie allemande s’organisait en ordres militaires, formait une noblesse très riche et pétulante, aux traits mystiques et parfois gestes suicidaires. À la fin du 19e et au début du 20e siècle en Allemagne, ils sont connus sous le nom de Junkers, forment la caste du pouvoir et développent la Ruhr comme la plus grande zone industrielle du monde. Ce complexe militaro-industriel a généré la Weltpolitik que Guillaume II a crié et a lancé, en raison de son puissant besoin d’expansion, l’Allemagne dans la Première Guerre mondiale, avec son intérêt déjà bien connu pour le Panama et le Nicaragua. Benoît XIV, le pape de l’époque, était très favorable à l’Allemagne, il la bénit abondamment, ce qui ne l’empêcha pas de perdre la guerre.

La suite de la défaite est la ruine. L’Angleterre, et surtout la France, se déchaînent contre l’Allemagne vaincue. Les films d’actualité montrent les femmes aux yeux hagards, les enfants affamés, l’homme qui va acheter de la nourriture avec une charrette pleine de billets parce que la monnaie allemande a été fracassée. C’est une vérité que le peintre alors frustré Adolf Hitler va commencer à dénoncer, accusant les Juifs d’avoir conspiré pour crucifier l’Allemagne.

Les Junkers ils avaient vécu intensément le rêve de toute-puissance de l’Empire de Guillermo II et ils vivent intensément la défaite. Vengeurs et brutaux, ils utilisent le peu de force qui leur reste pour massacrer les communistes qui tentent de prendre le pouvoir à Berlin. Ils pensent à la vengeance. Hitler grandit. Derrière elle se trouve la grande capitale de l’industrie lourde allemande, qui est restreinte par les clauses du traité de Versailles. Les Juifs, pour leur part, ne font pas confiance. Ils connaissent le monstre de l’antijudaïsme qui monte en Allemagne. En tant que capitalistes, ils s’opposent à l’URSS, mais ils savent que si elle disparaissait, ils auraient les nazis à leur tête. Ils calculent bien : les centaines de milliers de Russes tués pendant la Seconde Guerre mondiale, les jours héroïques de Stalingrad, tout en sauvant l’URSS, sauveront le capitalisme libéral et le judaïsme.

Dans un mélange égal à celui des chaises avec lesquelles le jeu commence éviter de, aujourd’hui nazis et juifs réapparaissent convertis en un même peuple. Ce que le cardinal Lefebre n’a pas réalisé fleurit aujourd’hui.